Projet Étincelles


Naissance du Projet

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Introduction

  • Je porte ce projet en moi depuis toujours. Il a juste évolué avec le temps, le contexte et l'expérience. C'était comme une sorte de rêve inaccessible, une forme de thérapie aussi dans les périodes de grosse révolte professionnelle. Des moments de doute, de déception, d'interrogation et d'enthousiasme ont ponctué cette longue maturation. En 2003, j'ai pris la plume et commencé l'écriture du projet. Depuis, je n'ai plus cessé de noter des ébauches d'idées, impressions, mots, phrases empruntées à d'autres qui ont résonné en moi... tout cela sous forme de flashs qu'il fallait capter au bon moment... d'où le nom de mon projet "Étincelles".

    Après une longue période de renoncement ou de latence, je sens que le projet est encore présent en moi. J'ai la certitude que seul l'accouchement de ce projet me fera revivre

    — 22 mars 2008

    Difficile encore de renoncer en 2024. Et pourquoi ne pas en faire un projet de retraite ?

  • Ce projet est porté par de fortes convictions largement confirmées avec le temps, l'expérience du terrain et ma proximité quotidienne avec les enfants.

  • Je ne pense pas innover mais plutôt renouer avec le bon sens et la simplicité.

  • Ce projet n'a aucune prétention sinon celle de proposer de la diversité, du choix, une alternative parmi d'autres. Il ne s'agit pas d'un énième traité de pédagogie et de conseils rédigé dans un jargon inaccessible au plus grand nombre, mais plutôt de petits morceaux de vie qui se veulent le reflet d'une scolarité d'élève et d'une carrière d'institutrice : expériences, intuitions, ressentis, convictions, observations, lectures, conférences, rencontres...

  • Car le plus beau cadeau que l'on puisse offrir à un enfant, c'est une enfance digne des meilleurs souvenirs, car le plus bel héritage que nous puissions lui léguer, c'est le terreau qui lui permettra de trouver sa propre voie. Il est urgent de penser l'école autrement.

  • Bien sûr, si l'objectif premier de ce projet reste la création d'une école, il se situe dorénavant dans une perspective de transmission. Je suis administrativement bientôt à la retraite. Mon ambition n'est plus d'en être la directrice ni même une des enseignantes. J'aimerais plutôt accompagner, conseiller, épauler, coacher... donner l'impulsion à cette aventure. La première étape sera donc de créer une équipe composée de profils passionnés et engagés autour de ce projet.

  • A travers ce projet, je veux participer d'une manière active au combat de la liberté scolaire qui, selon moi, est la seule solution pour redonner à l'école toute sa splendeur.

Constats

  • Le temps est devenu despotique. C'est un poids qui alourdit notre vie, les relations interpersonnelles, la communication, la culture, la vie familiale, les relations professionnelles, un poids contre lequel il est difficile de lutter. La mesure du temps nous a conduits à la prédominance de la quantité sur la qualité. Nous nous soumettons à cette vitesse contraignante pour ne pas être écartés ni exclus de la société. La vitesse et la consommation sont devenus des signes identitaires de la société, des critères d'intégration. En même temps que le quotidien s'emballe, la lenteur, le calme ou la patience se voient dévalorisés.

    Concernant les enfants, leur rythme journalier et hebdomadaire est effréné, frénétique : garderie, classe, cantine, activités diverses qui ponctuent les soirées et les week end. Soirées « devoirs, repas, douche, écrans ». Défendons les mots et les concepts tels que s'ennuyer, écouter, rêver, attendre, flâner ainsi que le besoin de retrouver des moments sans activités, des moments qui favorisent la réflexion.

  • Rôle néfaste des médias qui façonnent le mental, l'humeur et au final une personnalité.

    Éloigner et préserver les enfants de cette déferlante d'informations en boucle, trop souvent anxiogène.

    Contrebalancer par le côté positif de la vie et surtout relativiser par rapport au temps et à l'espace (en étudiant l'histoire, on s'aperçoit que les conditions de vie étaient difficiles, et en étudiant la géographie, on peut découvrir que le contexte de vie dans d'autres contrées est bien compliqué).

  • Enfants inquiets, stressés, en manque de repères et de modèles structurants et rassurants.

    Une vie d'adulte en miniature. Les problèmes des parents deviennent ceux des enfants. On leur parle d'égal à égal. On leur demande leur avis sur tout. Difficile d'accorder sa confiance à des adultes incapables de prendre des décisions, aussi mauvaises soient-elles. L'enfance n'est plus préservée.

  • Paradoxe : enfants infantilisés et déresponsabilisés (tout est décidé pour eux, ils n'ont plus d'espace de décision, de création) et en même temps, ils sont considérés comme des adultes sur lesquels repose une pression inadaptée à leur statut de petit humain en construction.

    Les enfants sont considérés comme les « doudous » de leurs parents qui seraient chargés de panser leurs plaies ou réparer leurs blessures d'enfance. Ils sont ainsi manipulés comme des objets que l'on veut s'approprier plus que comme des êtres à éduquer dans le but d'une vie autonome.

    On ne laisse plus aux enfants le luxe de vivre leurs expériences, dans un cadre éducatif donc sécurisé. Tout est anticipé, prévu, organisé, planifié à leur place sous prétexte de protection. Mais de quelle protection parle-t-on ? N'est-ce pas l'adulte qui se protège en enfermant l'enfant dans une cage dorée ? Mais quand la porte de cette cage s'ouvrira, à l'aube de la réalité de sa vie d'adulte, qu'adviendra t-il de lui, peu ou mal « outillé » pour affronter la vraie vie mais cette fois-ci sans cadre et encore moins sécurisé.

  • Tous les parents n'ont pas les mêmes attentes de l'école. Ce qui tue un peu l'école aujourd'hui, c'est l'attitude consumériste des parents. L'éducation ne se consomme pas, elle se vit, se partage et cela nécessite de la cohérence. Des parents plus informés, consultés, impliqués et respectés apportent de la cohérence entre l'éducation à la maison et l'éducation à l'école. L'enfant a besoin de cette cohérence pour bien se développer sans angoisse, sans sentiment de contradiction permanente.

    Certains se contentent d'une garderie gratuite, d'autres apprécient le côté « centre aéré » avec les multiples activités qui ponctuent la journée sans aucun répit et une partie, de plus en plus consciente des enjeux, réclame un lieu où on passe du petit consommateur, passif et capricieux à un futur citoyen actif, éclairé et responsable.

  • S'il n'y a pas cohérence école/famille autour du projet éducatif et scolaire, il est très difficile, voire impossible, de cheminer de manière sereine et efficace vers la réussite. Objectifs et moyens non partagés ne peuvent conduire qu'à une déstabilisation de l'enfant et à une perte de confiance dans les adultes.

  • Trop d'enfants sont laissés sur le bord du chemin. De nombreux enfants en souffrance, qui subissent un système qui ne leur convient pas. La tolérance, ce n'est pas affirmer que tout le monde est pareil.

  • On veut adapter l'enfant à l'école. C'est l'inverse qu'il faut faire.

    Dans le moule tu nais (maternité),
    dans le moule tu étudies (école),
    dans le moule tu travailles (entreprise),
    dans le moule tu vieillis (EHPAD),
    dans le moule tu meurs (cimetière).

  • Bases de fonctionnement de l'Éducation Nationale inadaptées :

    • Constitution d'une équipe, garante de réussite : L'Éducation Nationale essaie depuis de nombreuses années de mettre en avant le rôle fondamental d'un « esprit d'équipe ». A quelques rares exceptions près, cette idée généreuse est et sera vouée à l'échec. Cette impossibilité à créer une équipe, à dynamiser un groupe, trouve ses racines dans la manière de recruter et la politique très « égalitariste » qui anime chaque membre de cette énorme usine. Sous prétexte d'égalité et peut-être même de liberté, le critère essentiel de sélection est l'ancienneté et non la compétence. L'âge donne des droits et instaure automatiquement la légitimité. Or, le seul atout que confère l'âge est l'expérience, ce qui n'est certes pas négligeable. Mais il ne génère en aucun cas la compétence, la passion et la vocation. C'est pourquoi tant que sera maintenue cette aberration, certes pratique sur le plan de l'organisation, il ne pourra y avoir d'équipe. Des enseignants sont ainsi nommés dans des écoles sur le seul critère de leur barème, c'est à dire de leur ancienneté. A priori, ils n'ont aucun point commun, ils ne se sont pas choisis. Ils sont placés là au hasard d'un mouvement, comme des pions. On va leur demander de s'unir autour d'un projet commun qui n'a que très peu de chance de fonctionner de par son essence artificielle. Les motivations et les projets de chacun sont parfois aux antipodes. Cela produit de l'agressivité, de la frustration voire de la renonciation et une permanente inefficacité au sein de l'équipe. Par répercussion, il n'y a pas toujours la cohérence nécessaire dans les apprentissages et la progression des enfants. On désigne une équipe et on organise un petit bricolage « maison » autour d'un pseudo projet. C'est pourtant l'inverse qu'il faut envisager, un projet d'abord et une équipe ensuite qui fait consensus.
    • Pas vraiment le choix des méthodes.
    • Problème d'évaluation : le critère principal devrait être le résultat, c'est-à-dire la capacité à faire progresser l'enfant sur la durée et non les méthodes appliquées.

      « Libre des moyens, comptable des résultats », telle devrait être la devise.

    • Les cadres qui ont la responsabilité de faire fonctionner cette grosse machine sont de plus en plus « déconnectés » de la réalité du terrain et ont une approche idéologique de l'enseignement. Certains ne sont plus dans des classes depuis bien longtemps.
    • Conclusion : Il s'agit donc d'une crise structurelle. Le système a besoin de respirer, de se renouveler. Si on veut faire quelque chose de nouveau, c'est obligatoirement hors contrat. C'est un non choix. On a besoin de variété et plus on aura d'offres variées, plus cela stimulera tout le monde et plus on trouvera de solutions adaptées aux enfants.